de Fanny Taillandier.

À la lisière des sciences humaines (il est d’ailleurs publié aux PUF) et de la littérature, Les États et empires du lotissement Grand Siècle est un texte inclassable. S’il se lit comme un roman, du fait de ses évidentes qualités stylistiques, on le rangera plutôt en critique sociale. Ou pas.

Le lotissement Grand Siècle est situé à une dizaine de kilomètres de Versailles en région parisienne. Le lotissement pavillonnaire aura été un rêve pour beaucoup avant de devenir le repoussoir absolu aujourd’hui. Pour traiter de cette question urbaine, Fanny Taillandier utilise les ressorts de la fiction et même de la science-fiction. Elle imagine une équipe d’archéologues du futur découvrant les ruines du site et tâchant de comprendre ce que cette organisation spatiale (le lotissement pavillonnaire) dit de la société qui l’a produite.

Notre amnésie avance, scrutant les indices muets que recèle la terre, la ligne brisée et sûre des ruines. Étranges et colossaux tombeaux, indéchiffrables et fascinants hiéroglyphes qui parlent en leur mystère de ce que fut l’homme à l’homme qui ne le sait plus. Et parmi ces ruines, dépouilles flamboyantes d’un nouveau monde perdu, naît le besoin de rendre compte.

Ce texte est une critique en règle, implacable même, de l’idéal petit-bourgeois, centré sur lui-même, et de ses modes d’existence confortables et paisibles qui fonctionnent comme autant d’injonctions au conformisme. Le tout dans une langue irréprochable où l’on retrouve à la fois les qualités d’évocation de la littérature et la rigueur analytique des sciences sociales. A mettre entre toutes les mains !

Julien